Les acariens Varroa, qui ont progressivement infesté toutes les colonies d'abeilles au Luxembourg depuis le début des années 1980, sont associés à des maladies virales (virus de la déformation des ailes, virus du couvain, etc.) et à des protozoaires bactériens (p. ex. Nosema) de l'abeille mellifère. Celles-ci entraînent des déformations des abeilles, une espérance de vie réduite et une perte de l'orientation. C'est dramatique, car ce ne sont pas seulement les abeilles adultes qui tombent malades à long terme, mais le couvain, l'avenir de toute colonie d'abeilles. C'est pourquoi, en cas d'infestation accrue par le varroa, les colonies s'effondrent complètement, surtout en automne et pendant le semestre d'hiver. C'est pourquoi des traitements réguliers (souvent plusieurs fois par an) des colonies d'Apis mellifera, l'espèce occidentale d'abeilles mellifères, doivent être effectués dans le monde entier. Tous ces traitements posent des problèmes similaires à ceux de toutes les autres mesures de lutte contre les parasites dans l'agriculture : ils sont liés au développement de la résistance des parasites aux produits de traitement, à la formation de résidus dans les denrées alimentaires produites et aux dommages causés à l'hôte (nos abeilles). Ce dernier point est valable pour tous les types de traitement, notamment les traitements à l'acide formique et à l'acide oxalique. Même les mesures techniques d'exploitation (destruction du couvain avec des acariens) posent des problèmes éthiques.

L'abeille mellifère occidentale (Apis Mellifera) possède dans son patrimoine génétique, comme l'hôte d'origine de Varroa (Apis Cerana), des mécanismes de défense naturels. Ceux-ci sont toutefois très peu développés chez Apis mellifera. L'intensification de ces mécanismes par la sélection et l'accouplement ciblé, de telle sorte que les traitements deviennent superflus, est la voie naturelle et durable de la lutte contre Varroa. Il ne s'agit pas ici d'une adaptation progressive entre l'hôte et le parasite, impensable en cas de fortes densités d'abeilles comme au Luxembourg, mais de la résistance, c'est-à-dire de la résistance des abeilles à l'intrus (Varroa) dans le couvain.

Condition préalable au progrès possible par la sélection

La sélection ne peut modifier que les caractéristiques qui sont héréditaires. Dans notre cas, trois caractéristiques essentielles entrent en ligne de compte dans l'état actuel des connaissances :

VSH = Varroa Sensitive Hygiene, repose sur un sens de l'odorat accru des ouvrières en relation avec la tendance à une meilleure hygiène (en éliminant le couvain suspect) dans la colonie.

SMR = multiplication réprimée des acariens résultant du comportement d'éviscération mentionné ci-dessus et commandée en outre par des perturbations en partie inexplorées du cycle de multiplication des varroas dans le couvain.

Absence de signaux envoyés par le couvain aux acariens Varroa, qui provoquent la pénétration des acariens dans le couvain. Il s'agit ici de messagers (kairomones) apparemment manquants entre les espèces (abeille -- varroa). Il s'agit là d'une conclusion tirée des comptages de couvain effectués au cours de toutes les années du programme d'élevage (2014-2021). Une recherche fondamentale sur ce complexe serait nécessaire de toute urgence.

Le programme luxembourgeois s'explique en trois étapes

Etape 1 : Examen des populations d'abeilles luxembourgeoises des deux races d'élevage Carnica et Buckfast en ce qui concerne leur expression phénotypique (= ce que l'on peut voir et saisir) de la résistance héréditaire.

Étape 2 : regroupement additif de l'expression phénotypique de la résistance à Varroa trouvée à l'étape 1 par insémination instrumentale. L'insémination instrumentale est la seule possibilité d'obtenir des accouplements contrôlés chez les abeilles mellifères au Luxembourg.

Etape 3 : Mise en place de ruchers de fécondation sur la base des descendants créés à l'étape 2 et présentant un haut niveau de résistance phénotypique, en vue d'une dissémination naturelle des gènes de résistance par les faux-bourdons issus de ces colonies.

Résultats à l'automne 2021/ printemps 2022

La découverte et l'assemblage additif de mécanismes de résistance par insémination instrumentale ont conduit étonnamment rapidement à des lignées entièrement résistantes chez l'abeille Buckfast luxembourgeoise. Pour cette race d'abeilles, le programme de sélection a commencé bien des années plus tôt que pour d'autres races d'élevage. Mais de très bons résultats ont également été obtenus chez l'abeille carnique, qu'il convient de poursuivre. Pour les deux races d'élevage, l'objectif d'une résistance totale à Varroa destructor est à portée de main et a même été atteint en partie (pour certaines lignées de la race d'élevage Buckfast).

Personne n'osait le prédire au début du programme soutenu par l'État (2017).

Deux stations de fécondation (près de Fingig et près de Vianden) ont été mises en service. Dans le grand périmètre de ces ruchers, on trouve 80 à 100 colonies d'abeilles de souche résistante. La plupart des faux bourdons fécondent les jeunes reines installées sur les ruchers de fécondation. Les colonies d'abeilles qui en résultent sont très résistantes à la varroase, c'est-à-dire qu'elles ne nécessitent plus aucun traitement ou presque (résultats de l'automne 2021). Les ruchers de fécondation sont ouverts à tous les apiculteurs dans le respect des règles sanitaires et peuvent être utilisés conformément à la réglementation interne. Cela permettra d'introduire des gènes de résistance intensifiés dans la population générale d'abeilles. La situation de la varroase se détendra ainsi à long terme dans le pays, même chez les apiculteurs non éleveurs, dans les années à venir.

Contact

Programme de résistance au varroa: Nicolas JOSSELIN, Bigonville - Tel. 691 86 95 08 - josnico@pt.lu

Programme d'insémination (que en allemand ou anglais): Andreas REICHART, Wasserbillig,- Tel. 671 88 21 17 - beieberoder@apis.lu

Les faux-bourdons des ruchers de Fingig/Selange (B) et de Vianden, qui volent librement, exercent également leur influence sur les colonies d'abeilles des apiculteurs non éleveurs du pays.